Pour le dernier contrat de la fanfare, animer l'apéro d'un mariage, le rendez-vous s'est fait en pleine garrigue, au bout de kilomètres de chemins de terre pleins de hérissons écrasés, avec pour seule marque de la civilisation les immenses enfilades de poteaux électriques de trente mètres de haut, partant de la centrale hydraulique, qui suffisent à rendre l'endroit dégueulasse. Dans l'immense mas entouré d'hectares d'oliviers nous attendions, avec quelques vieillards de la famille du propriétaire qui séchaient dans la cour, contrex à la main, l'arrivée du cortège et des mariés. Des dizaines de klaxons, typiques de cette situation, hurlèrent que la fête pouvait commencer, et les voitures couvertes de nœuds de mousseline blancs et roses se mirent à vomir des beaufs comme seule la région sait en produire, aux cheveux gominés tenus par un serre-tête ou des lunettes de soleil blanches, chemises roses ou blanches transparentes rentrées dans des jeans moule-poutre avec au bout des chaussures cirées pointues comme des seringues, la moustache fine poudrée de blanc, la pupille dilatée et suant le pastis pur. Presque tous ces guignols arrivistes et vulgaires traînaient à leur suite des pouffiasses qu'ils tenaient par le cul, emballées dans des robes à pied de chameau. Quelques invités, malgré tout, avaient réussi à s'habiller dignement.
Et nous avons entamé l'insoutenable "marche nuptiale", sur demande du marié, morceau ringardissime pour un mariage hyper-cliché, au moment où les deux rois du plus beau jour de toute leur vie entraient sous les cris de la foule avinée et échauffée par les trente degrés à l'ombre. Elle d'abord, sourire figé dans sa robe à deux mille balles montrant à qui voudrait la voir son alliance monumentale avec plus de diamants que toutes les mines d'Afrique centrale, et baladant derrière elle deux gamines bouffies pour porter sa traîne. Lui, costume gris perle, plastron blanc éblouissant, noyé sous des litres de gel et d'eau de toilette et avec des grolles si brillantes qu'on s'y voyait vraiment courait dans tous les sens pour voir si tout se passait bien, besoin de rien, comment tu vas, tu pars déjà, et toute la liste des mondanités de circonstance. Nous jouions comme des brutes pour faire danser les agités dont certains titubaient et trébuchaient déjà sur les graviers.
Tout était réglé comme une horloge, et à la dernière note, ils passèrent tous à table, sauf quelques déchets qui nous gueulaient des noms de morceaux qu'on ne savait pas jouer. On nous prépara une table dans le jardin pour engloutir la paella avec deux moules, deux crevettes, un morceau de poulet et une rondelle de chorizo exactement par personne, arrosée de rosé et de gros rouge pour ceux qui ne conduisaient pas. Des invités qui préféraient la vodka du buffet de la cour au repas dans la grande salle vinrent nous mitrailler de blagues de cul en poussant des rires aussi gras que leurs cheveux. Après une bataille épique pour des cafés, chacun put rentrer chez soi, en étant mis en garde d'éviter les sangliers, et en roulant sur les cadavres secs des hérissons.
Et nous avons entamé l'insoutenable "marche nuptiale", sur demande du marié, morceau ringardissime pour un mariage hyper-cliché, au moment où les deux rois du plus beau jour de toute leur vie entraient sous les cris de la foule avinée et échauffée par les trente degrés à l'ombre. Elle d'abord, sourire figé dans sa robe à deux mille balles montrant à qui voudrait la voir son alliance monumentale avec plus de diamants que toutes les mines d'Afrique centrale, et baladant derrière elle deux gamines bouffies pour porter sa traîne. Lui, costume gris perle, plastron blanc éblouissant, noyé sous des litres de gel et d'eau de toilette et avec des grolles si brillantes qu'on s'y voyait vraiment courait dans tous les sens pour voir si tout se passait bien, besoin de rien, comment tu vas, tu pars déjà, et toute la liste des mondanités de circonstance. Nous jouions comme des brutes pour faire danser les agités dont certains titubaient et trébuchaient déjà sur les graviers.
Tout était réglé comme une horloge, et à la dernière note, ils passèrent tous à table, sauf quelques déchets qui nous gueulaient des noms de morceaux qu'on ne savait pas jouer. On nous prépara une table dans le jardin pour engloutir la paella avec deux moules, deux crevettes, un morceau de poulet et une rondelle de chorizo exactement par personne, arrosée de rosé et de gros rouge pour ceux qui ne conduisaient pas. Des invités qui préféraient la vodka du buffet de la cour au repas dans la grande salle vinrent nous mitrailler de blagues de cul en poussant des rires aussi gras que leurs cheveux. Après une bataille épique pour des cafés, chacun put rentrer chez soi, en étant mis en garde d'éviter les sangliers, et en roulant sur les cadavres secs des hérissons.